Autre élément essentiel d’un roman, le lieu, les lieux où nous déposerons notre intrigue. J’avoue qu’en ce moment circule une mode qui chatouille un peu mon côté grognon : c’est le choix quasi systématique des USA. Alors je sais qu’ils sont porteurs d’une certaine idée de liberté (même si j’aurais beaucoup à dire sur le sujet), qu’ils sont attrayants avec leurs grands espaces, leurs villes gigantesques et leur histoire (moins longue que la nôtre, mais différente). Qu’ils sont simplement porteurs de rêve avec un grand R… Mais est-ce une raison pour ne pas élargir notre horizon aussi bien en tant que lecteur qu’en tant qu’auteur ? Je n’arrive pas comprendre ce qu’ils ont de si mystérieux et séduisants par rapport aux autres ces Américains ! XDJ’adore lire un bon roman de Stephen King. Il crée des ambiances comme lui seul en a le secret avec sa multitude de détails - sans doute parce que c’est son pays, qu’il le connaît bien et qu’il sait en parler que ce soit en bien ou en mal. Il n’a pas de vision idéalisée comme cela peut être le cas pour nous. J’aime le côté réaliste de la société et des paysages qu’il dépeint même si un écrivain le fait toujours au travers d’un prisme qui lui est propre - mais j’apprécie également de me perdre dans d’autres pays au cours de mes lectures et durant la rédaction de mes romans. Je déteste avoir à penser que si je veux « vendre » il faut que j’en passe par la case USA parce que « c’est à la mode ». Surtout en ce qui concerne le genre bit-lit/fantastique. Je rappelle à toutes fins utiles que le genre fantastique est né en Europe ! D’ailleurs, je pense qu’un prochain article concernera ce sujet. Le vieux continent est le berceau de tout un folklore passionnant alors pourquoi systématiquement le déplacer ? Contrairement à ce que l’on pense, l’herbe n’est pas toujours plus verte ailleurs ! L’imagination peut s’accommoder de n’importe quoi si on lui laisse assez d’espace pour cela. La modernité du genre doit-elle obligatoirement passer par les États-Unis ? Rhaaa déjà, je commence à m’énerver XD Ne vous fourvoyez pas, j’aime énormément les USA comme beaucoup, mais qu’ils deviennent la pierre angulaire de tout « bon livre », là, je me révolte ! Et c’est la raison pour laquelle j’ai choisi Paris pour Midnight Détective, ainsi que d’autres pays pour les romans suivants. Je suppose que commercialement ce n’est pas le choix le plus judicieux, mais pour moi, l’auteur, ça l’est. Ce n’est pas que je n’avais pas envie de passer Outre Atlantique par caprice, mais j’ai senti que l’action devait se dérouler là et pas ailleurs. Comme je sais que dans un prochain roman, elle se déroulera en partie au Japon. Il est bien possible qu’un jour, j’aille faire un tour chez nos amis américains, mais pas dans l’immédiat.
Donc, une fois que le décor s’est imposé à vous, il nécessite tout de même un certain nombre de recherches. En effet, même si j’avais situé l’action chez moi, en Corse, j’aurais dû en faire XD Et là, j’avoue que Google me sauve souvent la vie. Une bonne partie de mes renseignements vient de chez eux, le tout saupoudré d’un zest de Google map. J’ai visité Paris, certes, mais pas assez pour bien connaître notre capitale. En revanche, penser « franchouillard » est plus simple que de penser américain LOL Non sans rire, ils ont presque des coutumes bien à eux XD Ce que j’essaie de dire en fait, c’est que chaque pays, chaque peuple a ses particularités et qu’il est peut-être plus facile lorsque l’on débute de parler de ce que l’on connaît. Par la suite, c’est vrai, il est passionnant de « s’expatrier » un peu partout au fil des pages que l’on noircit. Je suppose qu’à partir de ce moment-là, nous favorisons les pays qui nous attirent voire nous passionnent.
Les lieux que nous choisissons pour l’intrigue jouent tout de même pour au moins 40% dans l’intrigue et la qualité du roman, il ne faut donc rien négliger. Autre point important en ce qui me concerne : plus vous connaîtrez l’environnement où vivent vos personnages, plus ce que vous décrirez sera crédible. Certains ont prétendu que pour écrire Germinal Zola n’avait jamais mis les pieds dans une mine. Relativisons. Il s’est rendu dans le bassin minier du Pas-de-Calais pour y questionner les principaux concernés au moment d’une grève. Il n’a pas tout inventé ! Il a nourri sa créativité de faits et de paysages réels. Il savait ce que pensaient les mineurs, leurs conditions de travail, etc. Il le tenait de leur bouche. Il avait également pu constater de visu ce à quoi ressemble une région où fleurissent les mines. Évidemment, pour la plupart d’entre nous, c’est impossible à faire. À moins d’avoir hérité d’une partie de la fortune de Bill Gates, nous ne connaissons en général que peu d’endroits dans le monde et nous ne pouvons donc nous y balader au gré de notre imaginaire.
Parfois, nous nous mettons tout seul dans la panade XD Lorsque nous avons rédigé la suite du Boulevard des solitudes avec Paula nous avons dû situer le roman à Québec alors qu'aucune de nous deux n’a jamais mis un pied là-bas à notre grand regret, et bien évidemment, il n’était pas question de séjour canadien même si nous aurions adoré. Il a alors fallu se dépatouiller de ce léger souci XD. Décrire un lieu, un mode de vie, un parler que nous ne connaissions pas du tout. Galère ! Cependant, ce n’est pas irréalisable, je vous le concède. Aujourd’hui, Google et les livres sont d’une grande aide. Mais un petit fond d’une chose que nous avons vécu par nous-mêmes peut faire la différence, on ne me fera pas changer d’avis sur la question. Il m’arrive d’inventer des détails qui se révèlent par la suite erronés ou pas tout à fait juste et cela me pose souci. Je pourrais partir du principe que de toute manière les lecteurs ne connaissent même pas l’endroit ou le sujet dont je parle, mais il suffit d’un ou deux pour que cela me dérange… Et comme je voyage hélas rarement, je me retrouve à passer des heures devant mon écran pour vérifier le moindre détail. Pourtant, même ainsi, je sais qu’il y aura des couacs.
Pour bien faire, il aurait fallu que je situe mon intrigue à Venzolasca, mais là pour le coup, c’était du suicide MDR
Donc, pour résumer et surtout clarifier mon Gloubiblouga, il est impossible de connaître à fond plusieurs lieux. En choisir un qui nous est totalement étranger peut s’avérer difficile, voire risqué, car il nous oblige à un certain nombre d’élucubrations. Certains lecteurs s’en moquent totalement, mais d’autres le remarqueront. Pour débuter, situer une histoire dans un lieu que l’on connaît, même un peu, peut rendre la rédaction plus aisée et les descriptions du lieu moins erronées. Et voilà pourquoi Le boulevard des solitudes se situe sur la Côte d’Azur, Midnight détective à Paris, tout comme P’tit loup en cours de correction. Pour Là où meurt le soleil par contre nous avons pris davantage de risques, car nous n’avons jamais mis un orteil en Normandie. Et je suppose que les Normands s’en rendront compte XD
Personnellement, je suis souvent partagée entre ma raison et mes émotions. Il est clair que beaucoup d’endroits inconnus aiguillonnent ma muse. Mais par la suite, je sais que ce sera problématique. Quoi qu’il en soit, pour conclure, je vous dirais : choisissez le décor de votre roman parce qu’il vous parle ou parce qu’il vous est familier, mais certainement pas parce qu’il est vendeur. Faire cela fait de vous un homme ou une femme d’affaires pas forcément un auteur.
Et si vous écrivez de la Fantasy alors vous êtes « un elfe libre » XD
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Le décor
31 octobre, 2022
par
Alessia Dan