Dans le dernier article j’ai essayé d’aborder la condition d’auteur, la manière dont nous sommes parfois perçus et le fait qu’à chaque ligne que je couche sur le papier, enfin sur l’écran lol, je touche du bout des doigts mon rêve. Comme pour beaucoup de rêves, celui-ci n’est pas né d’hier, et la vision que j’avais des auteurs se trouvait déformée par le prisme de l’idéalisme engendré par les livres, les films ou les séries. Je m’imaginais devant ma machine à écrire comme Angela Landbury dans Arabesque (pas de commentaires là-dessus, s’il vous plaît ! lol).
Les PC n’étaient pas encore popularisés lorsque les muses ont frappé à ma porte, et mes premiers textes ont été rédigés à la machine à écrire même si cela paraît archaïque aujourd’hui XD, (et non, je ne sortais pas jouer avec les Brachiosaures durant mon temps libre, bande de Sagouins !). De ce fait, il était facile pour moi de m’identifier aux auteurs d’hier comme Agatha Christie. Je me souviens de la machine à écrire de ma grand-mère, rapportée d’Alger, il me semble, après l’exil et la guerre, de celle de ma mère offerte par mon grand-père. Je regrette aujourd’hui de ne pas avoir récupéré celle de ma grand-mère quand il était temps... Pas pour écrire, mais comme souvenir et objet décoratif. Mais je m’égare, revenons-en au sujet : le métier idéalisé. Je me voyais donc dans un beau jardin fleuri, sous une rotonde romantique ou face à l’océan, tapant des mots et des mots, visitant des pays pour plus de véracité dans le récit, travaillant sur des balcons en Italie ou des bateaux de croisières sur le Nil et ailleurs. Et j’ai un peu réalisé cette partie du rêve ! J’ai fait des croisières (pas sur le Nil) et même si je n’ai pas écrit à proprement parler durant la traversée, mon esprit s’est tout de même nourri de cette expérience, expérience qui m’a été utile pour rédiger le tome 2 des Arcanes de l’éternité, La mer s’habille de rouge. Ne vous affolez pas, les croisières ne ressemblent pas à celle de Luc MDR, vous pouvez y aller, théoriquement, rien ne viendra vous hanter, encore que l’on n’est jamais sûr de rien dans ce domaine, n’est-ce pas ? XD
À l’époque, je n’étais pas consciente que j’utiliserais ces voyages dans des romans, comme mon séjour à Paris chez une amie pour la rédaction de Midnight Detective. La dépression m’avait obligé à laisser mes rêves et mes espoirs sur le bas-côté de la route et je reprenais tout juste goût à la vie. Depuis, j’ai compris avec une acuité renouvelée que tout ce que nous faisons, pour les auteurs comme pour les autres, nourrit notre esprit et ce que j’appellerais notre âme à défaut d’autre mot. Les gens que nous rencontrons, les pays que nous visitons, les cultures que nous partageons, tout est une richesse incommensurable, bien plus que des billets de banque. C’est d’autant plus vrai pour quelqu’un qui doit structurer son imaginaire. Avoir des idées c’est bien, mais les enrichir de notre expérience, c’est mieux.
L’an dernier, mon séjour en Irlande a été encore plus magique que tout ce que j’avais connu, car j’y ai été, sachant que ce serait un des lieux décrits dans le tome 3 des Arcanes et dans Falinn. Pour la première fois, je me suis rendue sur place avec cette idée en tête, et chaque chose que je voyais, entendais, partageais, je l’intégrais différemment. Enfin, mon rêve et la réalité trouvaient un point de jonction. Bien sûr, ce n’était pas le bout du monde, c’était un voyage en groupe à la hauteur de mes moyens, mais j’en suis encore heureuse aujourd’hui de ce voyage. Rien que d’en parler à cet instant même est un bonheur. Depuis, en bonne rêveuse, je m’imagine dans un cottage sur la lande, durant quelques semaines, derrière une de leurs baies vitrées que l’on aperçoit parfois le long des routes dans de charmantes maisons. Un auteur ne cesse jamais de rêver dans le fond, pas une seconde. C’est à double tranchant, la vie est à la fois plus douce et plus difficile lorsque la réalité nous rattrape. Une sorte de montagne russe XD Mais j’ai quand même effleuré ce rêve d’enfant d’une vie d’auteur idéalisée l’espace d’une courte semaine, alors je me dis que ça vaut la peine de se battre. Si vous avez un rêve, ne laissez personne le piétiner à l’aune de cette fichue réalité ! Je ne dis pas qu’il ne faut pas en tenir compte ni que c’est facile, c’est même très risqué, mais il est monstrueux d’utiliser la « raison » pour briser des rêves. Les rêves, s’ils ne sont pas corrompus, font de nous de meilleures personnes, je pense et c’est une de leurs principales raisons d’être.
"Fais de ta vie un rêve, et d'un rêve, une réalité." Antoine De Saint Exupéry